C’est une donnée capitale pour les centres de soins mobilisés lors des opérations de démazoutage et des marées noires. Le 27 novembre 2021, un Guillemot de Troil bagué en 2003 a été retrouvé mort sur une plage des Pays-Bas. L’oiseau avait été victime, il y a 18 ans, d’une marée noire causée par le naufrage du Tricolor dans le Pas-de-Calais, et avait été pris en charge par la LPA et le CHENE.

La découverte de cet oiseau marin sur une plage d’Oosterend, en Hollande septentrionale, est un véritable saut dans le temps. Probablement mort depuis plus d’une semaine lorsqu’il a été découvert le 27 novembre dernier, ce Guillemot de Troil (Uria aalge) portait une bague et a été signalé au CRBPO (Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d’Oiseaux). En remontant sa trace grâce au numéro d’identification, le CRBPO a pu établir que le parcours de vie de ce spécimen n’était pas des plus banals.

Archives d’un naufrage

Cette histoire nous fait revenir en décembre 2002. Le Tricolor, navire norvégien transportant des véhicules, fait naufrage au large de Dunkerque. Une marée noire entraine une vaste mobilisation des associations de protection de la faune sauvage pour faire face au mazoutage de très nombreux oiseaux marins. La LPA de Calais, en première ligne, se trouve très vite débordée par l’afflux d’oiseaux en détresse, et fait appel à l’Association CHENE pour prendre en charge une partie des oiseaux mazoutés.

Parmi ces oiseaux, plusieurs seront relâchés à la suite de longs processus de soins, de nettoyage et de réhabilitation. Mais l’absence de preuve quant à leurs chances de survie laisse planer de nombreux doutes autour de la pertinence de la mobilisation des centres de sauvegarde. Faut-il prendre la peine de démazouter ces oiseaux après une telle exposition à des substances toxiques et polluantes ? Ne sont-ils pas condamnés, quoi que l’on fasse ? Sans observations permettant de prouver le contraire, les opérations massives de démazoutages restent questionnées.

Une aiguille dans une botte de foin

Difficile de fournir cette preuve de vie par la simple observation. Si les oiseaux mazoutés sont nombreux, ceux qui survivent jusqu’au relâcher le sont beaucoup moins. Aussi, parmi tous les oiseaux bagués vivants et observables à l’état sauvage, la chance de tomber sur un ancien oiseau mazouté semble ridicule. Celle de trouver un oiseau simplement bagué l’est déjà, la carcasse pouvant rapidement disparaître ou se trouver dans un endroit inaccessible ou peu fréquenté par l’être humain.

Il fallait donc bien ouvrir l’œil ce 27 novembre 2021 sur la plage d’Oosterend, aux Pays-Bas. Le Guillemot de Troil avait été bagué 18 ans plus tôt par l’Association CHENE. Faisant partie d’un des oiseaux transférés par la LPA de Calais au CHENE, le Guillemot avait été réhabilité par nos équipes et relâché à Yport le 18 mars 2003, à 954g.

Avec cette donnée maintenant recensée par le CRBPO, l’histoire d’un oiseau mazouté ayant survécu à sa remise en liberté peut maintenant prouver que la mobilisation des centre de sauvegarde lors des marées noires n’est pas vaine.

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